Jamais toujours

Nuit agitée, réveil à l’aube. L’appartement, d’une pièce à l’autre. Lecture des actualités, l’autorité des ruines. Politique des cookies et gérer les traceurs. Thé vert, l’affirmation de la continuité, la mort de Dieu mais pas tant que ça. Nouvelles de l’au-delà, les affaires religieuses. La fornication et l’adultère sont à l’origine de la pandémie, les hommes font preuve d’indignité. Messes clandestines, reconquête des territoires par les royaumes chrétiens. Priez les anges gardiens, vous serez protégés. Foire aux miracles, votre salut est menacé. Je vois le Mal, des cris d’extase. Sa Voix commande, sauver une âme. Délire avec obstination, l’angoisse qui m’envahit. Assemblées de sorcières, suivi par GPS des personnes infectées (backtracking), du sang de survivant en vente sur le dark web. L’effroi commande. Belzébuth se fait tailler la barbe dans son appartement de la Place des Vosges, fait cuire des brochettes de cœurs de canards sur sa terrasse. Le virus est trending sur YouPorn, la mort est au clavier. Totalité du devenir, à la manière d’une épopée. S’il y a une guerre elle est économique. De toutes les guerres, pleine démesure. Industrie funéraire, quels sont les protocoles ? Embaumement et thanatopraxie sont interdits, la housse mortuaire désinfectée. Délai d’inhumation ou de crémation, vigiles et rottweilers devant les pharmacies. Trafics de masques, Alex se tient près d’une fenêtre. Elle fume sa cigarette en regardant la rue, son téléphone est sur le canapé. Il y a un plateau par terre (assiette et couverts). A-t-elle écouté un seul des mots prononcés par sa mère ? Elle s’approche de son PC, et elle éteint sa cigarette. Elle dit j’ai la pénible impression d’être en faute. Elle dit c’est pas nouveau, ça ne m’a jamais menée nulle part. Elle dit tu ne dis rien ? Je dis non. Elle dit tu fais quoi ? Pas grand chose. Ses lèvres, sa bouche, son nez, ses yeux, son ventre. La beauté impuissante. C’est un de ces jours où que l’on dise ceci, cela ou autre chose, peu importe vraiment. Se taire et parler pourtant, la sensation ne porte plus. Rien ne bouge, et à demeure.

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